Dans un climat déjà lourd de désillusion, le ministère américain de la Justice vient de prendre une décision qui a fait l’effet d’un coup de massue pour de nombreuses familles et militants. Malgré les espoirs nourris après les drames de George Floyd et Breonna Taylor, les autorités fédérales ont décidé de mettre fin aux enquêtes sur les pratiques controversées des forces de l’ordre de Minneapolis et Louisville.
Ce revirement, qui intervient quatre ans après les événements tragiques de 2020, a immédiatement suscité une vague d’indignation. Pour beaucoup, cette annonce équivaut à un abandon pur et simple de la promesse de réformes profondes. L’avocat Ben Crump, figure de proue des luttes contre les violences policières, n’a pas mâché ses mots, dénonçant une « gifle » infligée aux familles endeuillées et aux communautés noires encore meurtries.
Le département de la Justice s’est défendu en évoquant des failles méthodologiques dans les enquêtes initiales. Selon ses services, les conclusions reposeraient sur des données jugées incomplètes, ce qui remettrait en cause la solidité juridique des procédures engagées. Mais pour les défenseurs des droits humains, cette justification sonne comme une trahison. Une manière bureaucratique de tourner la page sans affronter les responsabilités.
Ce n’est pas seulement Minneapolis ou Louisville qui sont concernées. D’autres villes comme Phoenix ou Memphis, elles aussi ciblées par des enquêtes similaires, pourraient voir leurs dossiers refermés dans un silence tout aussi amer. Le signal envoyé est clair : les promesses de justice peuvent être suspendues, les réformes stoppées net, malgré les cris étouffés des victimes et les appels incessants des rues.
Depuis la mort de George Floyd, l’Amérique s’était engagée, du moins en apparence, sur la voie d’une introspection nécessaire. Des engagements avaient été pris, des discours forts avaient été prononcés. Pourtant, ce geste du département de la Justice vient aujourd’hui jeter un froid glacial sur ce cheminement. La mémoire collective se heurte une fois de plus à la réalité d’un système où les comptes ne sont pas toujours rendus, et où l’espoir d’un changement structurel semble à nouveau repoussé.
Au-delà de la décision administrative, c’est une question de confiance qui est posée. Que vaut l’engagement d’un État lorsqu’il recule face à la pression du statu quo ? Quel message reçoit la population afro-américaine quand les institutions, censées la protéger, ferment les yeux sur les dérives passées ?
La douleur des proches de George Floyd et Breonna Taylor ne s’effacera pas. Et avec cette annonce, c’est une nouvelle blessure que la société américaine inflige à elle-même. Une blessure faite d’oubli, de renoncement et de silence.