Cinq mois après sa prise de fonction à la tête du Conseil présidentiel de transition, Fritz Alphonse Jean laisse derrière lui un vide saisissant. Aucun cap, aucun message fort, aucune décision structurante. Dans un pays au bord du gouffre, il aura été, au mieux, un figurant ; au pire, un obstacle.
L’ancien gouverneur de la Banque centrale, économiste réputé, était pourtant attendu comme un homme de propositions. Son arrivée à la coordination du Conseil présidentiel avait suscité l’espoir d’une transition plus lisible, plus cohérente, plus engagée. Mais depuis le 7 mars 2025, Haïti n’a connu que l’inaction, le désintérêt apparent et l’amateurisme.
À force de critiquer les autres depuis tant d’années, Fritz Jean semble avoir perdu l’habitude de se regarder en face. Dans le rôle de coordonnateur, il s’est comporté comme s’il était encore dans l’opposition plus prompt à dénoncer qu’à construire, plus à l’aise dans le commentaire que dans l’exercice de la gouvernance. Son mandat se résume à une succession de gestes sans portée, de symboles creux, quelques piques lancées à la presse, une tournée diplomatique inutile en Jamaïque.
Pendant ce temps, l’appareil étatique reste figé, les réformes urgentes n’ont jamais été amorcées, et les signaux adressés à la population sont profondément décourageants. Fritz Jean, dans ce contexte de chaos, a choisi la fuite. Non pas celle du corps, mais celle de l’esprit, de la responsabilité, de la parole forte.
Son passage à la tête du Conseil présidentiel restera comme un épisode de plus dans la longue série des occasions ratées. Il incarne cette élite haïtienne qui, une fois en position de responsabilité, semble saisie d’apathie, comme si l’exercice du pouvoir n’était qu’un théâtre d’ombres.
Reste à espérer que Laurent Saint-Cyr, son successeur, ne sera pas, lui aussi, « un homme qui passait par là ».