Par Serge Junior Fécu
Un concert de l’artiste haïtien Tonymix, prévu à Saint-Domingue dans le cadre d’un événement culturel officiel organisé par un promoteur local et le club Euphoria, a été brutalement annulé à la suite d’une campagne publique lancée par deux ressortissants haïtiens résidant aux États-Unis.
Dans une vidéo devenue virale, ces derniers ont appelé un agent de l’immigration dominicaine, demandant l’intervention des autorités pour « empêcher les Haïtiens de célébrer » sur le sol dominicain tant que, selon eux, « les Haïtiens y sont maltraités ».
Cet appel, au-delà du symbole, a eu un impact concret et dévastateur : climat de peur, annulation de l’événement et pertes économiques importantes pour le promoteur, sans parler de la violation de la liberté artistique pour l’artiste concerné.
Une incitation publique à la discrimination
En appelant depuis l’étranger à une action ciblant spécifiquement des ressortissants haïtiens lors d’un concert pacifique, les auteurs se rendent coupables d’une incitation à la discrimination culturelle et nationale.
Ces faits vont à l’encontre des normes internationales en matière de droits humains, notamment l’article 27 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, l’article 15 du Pacte sur les droits économiques, sociaux et culturels, ainsi que l’article 1 de la Convention américaine relative aux droits de l’homme.
Une atteinte à la liberté artistique
Empêcher un artiste de se produire revient à restreindre la participation à la vie culturelle, un droit reconnu par l’article 27 de la Déclaration universelle des droits de l’homme.
Ce type de pression publique, même lorsqu’elle émane de particuliers, constitue un abus de la liberté d’expression lorsqu’elle vise à réduire au silence une expression culturelle légitime.
Une campagne transnationale d’intimidation
Plus récemment, les mêmes individus ont reproduit ce comportement en diffusant de nouveaux messages visant des événements haïtiens prévus aux États-Unis, en prétendant que la présence d’artistes haïtiens attirerait les autorités migratoires américaines (ICE).
Ces déclarations, délibérément alarmistes, cherchent à dissuader le public d’assister à des manifestations culturelles haïtiennes et participent d’une campagne d’intimidation transnationale contre la libre expression artistique et la diaspora culturelle haïtienne.
Responsabilité et réparation
La diffusion de cet appel a provoqué un préjudice économique direct : investissements perdus, image ternie et entrave à la coopération culturelle haïtiano-dominicaine.
Selon le principe de responsabilité civile (article 1382 du Code civil dominicain), tout acte qui cause un dommage oblige son auteur à le réparer.
Des actions judiciaires sont envisagées en République Dominicaine et aux États-Unis contre les personnes à l’origine de cette incitation publique à la haine.
Un précédent inquiétant
Au-delà de l’affaire Tonymix, cet incident illustre la fragilité de la liberté artistique haïtienne à l’étranger.
Les États, mais aussi les individus, ont l’obligation de protéger la diversité culturelle et de s’abstenir de tout acte discriminatoire.
La culture ne devrait jamais devenir la victime collatérale des tensions politiques ou identitaires.
Serge Junior Fécu,
Internationaliste,
CEO Immobilier 509 Real Estate en République Dominicaine